Changer d’échelle, ça se prépare !

Les Petites Cantines et Chez Daddy : deux belles entreprises sociales expertes du lien social nous racontent comment elles créent leurs réseaux afin de démultiplier leur impact.

Agir localement en pensant globalement, c’est bien, mais pour faire évoluer les choses en profondeur, il faut atteindre une échelle suffisante. Quelle est donc cette échelle ? Et comment l’atteindre en grandissant sans se renier ? Chaque organisation construit sa propre réponse. Nous avons interrogé deux fameux pionniers qui ont décidé de révolutionner le lien social à grande échelle : Les Petites Cantines et Chez Daddy.

Bénédicte Pachod, pilote du pôle expertises, Les Petites Cantines.

Bénédicte Pachod

Philippe Albanel,
fondateur de Chez Daddy.

Les deux entreprises sociales ont démarré dans la même période, en 2016. A l’époque où Diane Dupré La Tour ouvrait la première petite cantine à Lyon Vaise, Philippe Albanel construisait son réseau afin de proposer des solutions à l’isolement des personnes âgées. Après avoir œuvré dans l’aide à domicile, c’est en mai 2021, que Philippe profite d’un local proposé par un bailleur social pour ouvrir le premier Chez Daddy, un café de quartier ouvert à tous, destiné à lutter contre l’isolement des seniors.

Diane Dupré La Tour et Bertrand Vial, cofondateurs des Petites Cantines.

Diane Dupré La Tour
et Étienne Thouvenot
ont co-fondé
la première Petite Cantine
à Lyon – Vaise
en 2016.

Avoir de l'impact

En 2022, Chez Daddy commence à voir plus loin : le CCAS de Lyon lui offre l’opportunité d’ouvrir un deuxième Chez Daddy en transformant l’ancienne cantine d’une résidence intergénérationnelle en un café-restaurant associatif intergénérationnel et convivial, près de la gare Perrache. Aujourd’hui, il passe la vitesse supérieure avec l’ambition d’ouvrir pas moins de treize nouveaux lieux d’ici à fin 2025. « Si on ne changeait pas, nous serions frustrés de ne pas pouvoir aller plus loin. J’aime lancer des projets. Avoir de l’impact, c’est important pour moi. C’est un moteur. »

Mais si le premier essaimage était, de l’aveu de Philippe, « plus subi que délibéré », celui-ci a depuis opéré les changements nécessaires pour se mettre en ordre de bataille en créant une structure porteuse du réseau et en confiant le pilotage du développement à sa directrice : « J’ai eu la prise de conscience personnelle que je n’étais pas la bonne personne pour ça. Mon rôle sera d’être présent sur les réseaux, auprès des partenaires… »

Discours de preuve

A ses débuts, Philippe Albanel n’avait donc pas encore en tête l’ensemble de son plan de développement. A l’inverse, quand ils créent la première Petite Cantine, « Diane et Etienne étaient ambitieux, raconte Bénédicte Pachod, pilote du pôle expertises au réseau des Petites Cantines. Ils avaient l’idée d’aboutir à 50 cantines et 5 000 convives réguliers afin de défendre un projet de société par un discours de preuve : le repas est un vecteur de lien social. »

L’idée de faire réseau pour disséminer l’expérience était donc dans les gènes du projet. Cependant, il a fallu expérimenter pour trouver la bonne formule : « Il faut prévoir le temps de structuration du changement d’échelle avant celui du changement proprement dit, remarque Bénédicte. On ne peut pas juste décréter un plan et s’y tenir. Il faut évoluer et affiner au fur et à mesure des réalités. »

Ainsi, au début, l’organisation a fait l’expérience de quelques difficultés humaines avant de savoir comment recruter les bons profils de personnes pour leurs « maîtres·ses de maison », un métier atypique qui cumule cuistot, animateur et entrepreneur.

Communauté apprenante

En 2018, Les Petites Cantines ont été lauréates du programme P’ins. L’accompagnement les aide à trouver leur modèle d’essaimage : ce sera un réseau d’associations autonomes et interdépendantes. « Interdépendantes car c’est une communauté apprenante constituée de groupes de travail entre pairs qui partagent les questionnements du quotidien. » A chaque cantine son association, avec ses administrateurs bénévoles qui recrutent un·e maître·sse de maison salarié·e. Charge à l’équipe support, basée à Lyon, de transmettre l’ADN des Petites Cantines au sein du réseau en entretenant le sentiment d’appartenance. « Nous apportons une expertise technique : on lève des freins mais on ne fait pas à leur place. Il ne s’agit pas d’un changement d’échelle centralisé avec des filiales. On reste avec une relation de proximité avec des habitants qui connaissent leur territoire. »

La convivialité aux Petites Cantines.

Ne pas aller trop vite

Chez Daddy, quant à lui, fait le choix inverse en recrutant directement un gérant pour chacun de ses nouveaux établissements en Haute-Savoie et près de Lyon. Chacun des gérants s’entoure de bénévoles et de personnes en service civique. « Les Petites cantines ont un impressionnant savoir-faire d’animation. Pour ma part, je me sens plus à l’aise avec l’idée d’avoir un gérant qui soit notre référent sur place. »

On l’aura compris : il n’y a pas qu’une seule stratégie de changement d’échelle. Le tout est de bien comprendre quelle est la bonne pour son organisation, comme l’explique Bénédicte Pachod : « C’est chouette de ne pas aller trop vite et se poser au départ les bonnes questions : quel est mon degré de contrôle sur les projets qui voient le jour, mon degré de liberté, le besoin de centraliser en interne… »

Prendre du recul

Philippe Albanel partage cet avis : « Le plus important, c’est de bien s’entourer. Essayer d’identifier le « pourquoi » on a envie de changer d’échelle. Savoir si on ne s’embarque pas un peu parce qu’il n’y a pas le choix, parce que les partenaires veulent vous y emmener. Pour cela, il est indispensable de prendre du recul, de parler à des pairs qui traversent la même chose. » C’est ainsi que Philippe a justement bénéficié du mentorat d’Etienne Thouvenot, des Petites Cantines.

Bien s’entourer, c’est aussi l’objectif de notre parcours « changement d’échelle » qui vous propose une préparation de neuf mois au projet de changement d’échelle pour démultiplier votre impact en faisant les bons choix.

Pour aller plus loin...

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